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5 décembre, journée mondiale de sols - Quand la terre se dérobe sous nos pas, l’agroécologie est un recours

La dégradation de terres commence par celles des sols, c’est-à-dire ces quelques centimètres de pellicule vivante de la surface terrestre et matrice de vie biologique, et pourtant fondement essentiel la biosphère vivante.

S’il faut 2 000 ans pour fabriquer une dizaine de centimètre de sol vivant, fertile et productif, soit le temps d’environ 80 générations humaines, le rythme de dégradation et de perte des sols cultivables est 100 fois plus élevé que celui du sol à se former. On approche l’ordre d’un hectare par seconde. Un tiers des terres cultivables ont été perdues depuis les 40 dernières années et 25 % des terres cultivées sont menacées de désertification ou de dégradation.

Partout dans le monde les sols se dégradent, certains massivement comme en Asie et en Afrique sous l’effet du climat, de l’érosion par l’eau ou le vent, sous l’action de la chaleur, de la sécheresse, et surtout sous les actions humaines qui portent atteinte à son fonctionnement, sa composition, sa perméabilité, sa microfaune constituée de milliards d’organismes vivants. L’agriculture industrielle et ses mauvaises pratiques mécaniques et de dopage chimique, la course à l’urbanisation et son emprise bétonnière, les incendies, la surexploitation des ressources en eau, sont parmi les premières causes de ces dégradations.

Si le phénomène est actif partout, c’est dans les zone sèches et arides de la planète qui représentent 44 % de la surface terrestre et hébergent plus d’un milliard et demi d’habitants que la dégradation que l’on nomme ici désertification est le plus alarmant, sous les effets aggravants de la chaleur et de la sécheresse.

La dégradation des sols entraine celle des terres et des écosystèmes entiers, ainsi que de leur couvert végétal. La sécurité alimentaire, la biodiversité, ainsi que tous les services prodigués par ces écosystèmes telle que la filtration de l’eau, la fourniture de fibres, la production agricole ou les produits pour la santé, sont alors menacés, voire détruits. Dans de nombreux cas, les terres ainsi dégradées conduisent à des vies dégradées et conduisent localement et régionalement à des instabilités sociales et économiques, des conflits sur les ressources, mais à aussi des phénomènes plus insidieux ou déportés à longue distance, tels que l’instabilité sociale engendrée par les migrations et l’insécurité liée aux revenus de substitutions générés par le développement de trafics illégaux.

Parmi les 17 objectifs de développement durable (ODD), l’objectif 15 concernant la vie terrestre et sa cible 15.3 vise « d’ici à 2030, lutter contre la désertification, restaurer les terres et sols dégradés, notamment les terres touchées par la désertification, la sécheresse, les inondations, et s’efforcer de parvenir à une mode sans dégradation des sols ». L’indicateur retenu est « la surface des terres dégradées en proportion de la surface terrestre » et symbolisé par la Neutralité en matière de dégradation des terres. La science estime que cette neutralité doit être poursuivie à trois niveaux : éviter les nouvelles dégradations, réduire les dégradations que l’on ne peut éviter et restaurer les terres dégradées. Selon la Convention des Nations Unies de lutte contre la Désertification, plus de 130 pays dans le monde ont déjà fixé leur cibles volontaires de neutralité en matière de dégradation des terres.

Dans ce contexte, les agricultures écologiques notamment l’agroécologie permet à la fois de réduire la dégradation et de restaurer les sols dégradés, mais aussi d’éviter de nouvelles dégradations tout en maintenant et accroissant la fertilité, la productivité, la biodiversité, et, d’une manière générale, la santé des écosystèmes. Elles sont parmi les solutions les plus urgentes à mettre en œuvre et à financer via des politiques publiques dédiées visant également la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté. Les co-bénéfices attendus en termes d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre et de séquestration du carbone font de l’agroécologie une voie urgente à mettre en œuvre. Le CARI y est engagé depuis 20 ans. Comme les participants du dernier Forum International Désertif’Actions de Ouagadougou l’ont encore rappelé, « nous sommes la Terre qui combat la désertification ».

Patrice Burger – Président du CARI

Ressources FAO du Partenariat mondial sur les sols

Image par klimkim

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